2022

WP 2022.10 The impact of air pollution on labour productivity in France

Clara Kögel

Résumé
Cet article étudie l’effet de la pollution de l’air sur la productivité du travail dans les établissements français des secteurs manufacturiers et des services marchands non financiers de 2001 à 2018. J’utilise une méthode de variable instrumentale, basée sur la hauteur de la couche limite planétaire et la vitesse du vent, pour identifier l’effet de la pollution de l’air sur la productivité du travail. J’estime qu’une augmentation de 10 % des particules fines entraîne en moyenne une diminution de 1,5 % de productivité du travail, compte tenu des caractéristiques spécifiques à l’entreprise et d’autres facteurs. J’examine également différentes dimensions de l’hétérogénéité à l’origine de cet effet négatif. Je constate que l’effet négatif de la pollution est principalement dû aux entreprises et aux secteurs à forte intensité de services avec une proportion élevée de travailleurs hautement qualifiés. Cela correspond aux attentes selon lesquelles la pollution de l’air affecte en particulier les compétences cognitives, la concentration, les maux de tête et la fatigue particulièrement important pour les tâches cognitives non routinières.
Par rapport au coût de réduction marginal des réductions de PM 2,5 par la directive 2008/50/CE sur la qualité de l’air, les gains estimés provenant uniquement du canal de la productivité du travail pourraient largement compenser le coût de réduction. Dans l’ensemble, ces estimations suggèrent que l’impact négatif de la pollution de l’air est beaucoup plus important que ce qui était précédemment documenté dans la littérature.

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WP 2022.09 Construire un indicateur de PIB inclusif et soutenable. Que peuvent apporter les valeurs de référence du calcul économique ?

Selma Labroue – Dominique Bureau

Résumé
Alors que les comptes nationaux ignorent les composantes non marchandes du bien-être liées à l’état de l’environnement et laissent de côté les questions d’inclusivité et de soutenabilité, le « PIB » demeure l’indicateur-phare pour évaluer la richesse d’un pays. Suite à la commission Stiglitz-Sen-Fitoussi, le souci a été de compléter ce dernier par des indicateurs complémentaires, ce qui a permis d’enrichir les analyses, mais au prix de la dispersion d’approches toujours plus multidimensionnelles.
On assiste aujourd’hui à des tentatives pour faire plus directement le lien avec la comptabilité nationale. Mais la question demeure : peut-on trouver des approches synthétiques, pour « remplacer le PIB » ? Le développement de nouvelles références pour le calcul économique public, s’intéressant justement aux enjeux de soutenabilité et relevant d’un cadre microéconomique cohérent, peut y contribuer car il adresse les mêmes thématiques et produit des valeurs de référence. Afin d’apprécier l’utilité de ces valeurs pour évaluer la richesse véritable créée sur une période, dans l’esprit de la comptabilité nationale, on teste la possibilité pratique de compléter ainsi les indicateurs usuels de PIB et d’épargne, pour y intégrer les dimensions liées à l’équité, au patrimoine naturel (effet de serre et biodiversité), à l’éducation et à la santé des populations.
Les ajustements correspondants sur l’épargne et la consommation nous amènent à l’évaluation d’un ‘PIN élargi’ de l’ordre (seulement) de 1500 milliards d’€2014 en 2019. L’étude permet par ailleurs de mieux apprécier les poids relatifs de ses différentes composantes, ainsi que la nature des enjeux qui y sont associés. Si la nécessité d’articuler les développements sur les indicateurs de croissance avec les travaux microéconomiques visant à définir des valeurs monétaires telles que le coût social du carbone se trouve confortée, différents chaînons manquants et lacunes sont pointés.

WP 2022.08 Crop Prices and Deforestation in the Tropics

Publié dans Journal of Environmental Economics and Management (2023), 119: 102819.

Nicolas Berman – Mathieu Couttenier – Antoine Leblois – Raphael Soubeyran

Résumé
La demande alimentaire mondiale augmente, sous l’effet de la croissance de la population mondiale et des changements de régime alimentaire dans les pays en développement. Cette situation incite les agriculteurs à augmenter la production agricole, ce qui, à son tour, accroît la demande mondiale de terres agricoles et la pression sur les forêts tropicales. Étant donné la probabilité que la croissance de la demande alimentaire mondiale se poursuive, cette pression ne devrait pas s’atténuer au cours des prochaines décennies. Si l’impact de la demande alimentaire sur la déforestation a fait la une des journaux, les preuves rigoureuses de la relation entre les prix des cultures internationales et la déforestation à l’aide de données à grande échelle restent rares. Nous tentons de quantifier ce lien au cours du XXIe siècle en utilisant des données annuelles à haute résolution sur la déforestation dans les régions tropicales, combinées à des informations sur l’adéquation des cultures à l’agriculture et sur les prix annuels mondiaux de ces cultures. Nous constatons que la variation des prix a un impact considérable sur la déforestation : on estime que l’augmentation des prix des cultures est responsable d’un tiers de la superficie totale déboisée dans les tropiques (environ 2 millions de km²) au cours de la période 2001-2018. Nous constatons également que le degré d’ouverture au commerce international et le niveau de développement économique sont des caractéristiques locales de premier ordre qui affectent l’ampleur de l’impact des prix des cultures sur la déforestation.

WP 2022.07 Do forest conservation policies undermine the soybean sector in the Brazilian Amazon? Evidence from the blacklisting of municipalities

Léa Crepin

Résumé
Minimiser les compromis entre la production agricole, le développement économique et la conservation des forêts est essentiel pour que les politiques de conservation puissent être efficaces à long terme. En prenant le cas de l’Amazonie brésilienne dans le contexte du plan d’action pour la prévention et le contrôle de la déforestation en Amazonie légale, nous estimons les effets sur le secteur du soja et les changements d’usage des sols de la mise sur liste noire des municipalités présentant un risque élevé de déforestation. Des régressions difference-in-difference et une méthode de contrôle synthétique généralisée sont d’abord utilisées pour déterminer les impacts de la politique. La méthode des triple différences est ensuite appliquée pour explorer l’hétérogénéité des changements de production et d’exports entre les municipalités. Nous constatons que, bien qu’efficace pour réduire la déforestation, la politique n’a probablement pas nui à la production et aux exportations de soja. Au contraire, nos résultats suggèrent que le secteur du soja a bénéficié des changements dans l’utilisation des terres après la mise en œuvre de la liste noire. Cependant, nous ne trouvons pas de preuve que les contraintes sur les terres ont provoqué l’intensification de la production de soja, ce qui suggère que le soja a bénéficié d’une réallocation intra-cultures.

WP 2022.06 Controlling an infectious disease and sustainability: lessons from Hartwick’s Rule

Can Askan Mavi – Benteng Zou

Résumé
Cet article tente de comprendre comment une maladie pandémique modifie la relation entre les différentes productions facteurs tels que la main-d’œuvre, le capital et l’extraction des ressources naturelles selon le critère du maximin, qui consiste de fournir une utilité constante à chaque génération dans le temps. Nous montrons que la politique de prévention joue un rôle important pour mettre en place une économie optimale et durable. Nous montrons également qu’une politique publique comme le confinement ou la distanciation sociale peuvent diminuer ou augmenter l’extraction des ressources naturelles, selon sur le coût de la politique publique. Comprendre ces cas opposés est crucial pour savoir comment créer un fonds souverain (c’est-à-dire l’accumulation de capital) composé de rentes de ressources naturelles. Un autre résultat important est que dans une économie confrontée à une pandémie, une augmentation de l’extraction des ressources naturelles ne signifie pas une augmentation directe de l’accumulation de capital comme documenté dans la littérature existante. Dans ce sens, nous remettons également en question la règle bien connue de Hartwick « toutes les rentes de ressources investies dans l’accumulation de capital ».

WP 2022.05 Valuation of Ecosystem Services and Social Choice: The Impact of Deliberation in the context of two different Aggregation Rules

A paraître dans Social Choice & Welfare

Mariam Sy – Charles Figuières – Hélène Rey-Valette – Richard Howarth – Rutger De Wit

Résumé
Cet article décrit une étude empirique de l’agrégation et de la délibération – utilisée lors d’ateliers citoyens – pour l’élicitation des préférences collectives sur 20 services écosystémiques (SEs) différents rendus par les lagunes côtières de Palavas situées au bord de la mer Méditerranée près de Montpellier (sud de la France). L’impact de la délibération est appréhendé en comparant les préférences collectives construites avec et sans délibération. Les mêmes règles d’agrégation ont été utilisées avant et après délibération. Nous avons comparé deux méthodes d’agrégation différentes, à savoir l’évaluation participative rapide des services écosystémiques (RESPA) et le jugement majoritaire (MJ). RESPA avait été spécifiquement testé pour les SEs, tandis que MJ évalue le mérite de chaque élément, un SE dans notre cas, dans une échelle de jugement ordinale prédéfinie. L’impact de la délibération était le plus fort pour la méthode RESPA. Ces nouvelles informations acquises à partir de l’application de la théorie du choix social sont particulièrement utiles pour l’économie écologique étudiant les SEs, et plus concrètement pour le développement d’approches délibératives pour les politiques publiques.

WP 2022.04 Why health matters in the energy efficiency–energy consumption nexus? Some answers from a life cycle analysis

Publié dans The Energy Journal (2023), 44:

Sondès Kahouli – Xavier Pautrel

Résumé
Cet article montre que la prise en compte des enseignements de la littérature interdisciplinaire montant un lien de causalité entre l’efficacité énergétique et la santé ainsi que de la littérature réévaluant l’importance de la santé dans la productivité de la main-d’œuvre pourraient expliquer une partie de la relation paradoxale trouvée entre l’efficacité énergétique et la consommation d’énergie.
Nous construisons un modèle à générations imbriquées à 3 périodes où nous supposons que l’inefficacité énergétique résidentielle induit des maladies chroniques chez les jeunes et une mauvaise santé chez les personnes âgées. Nous supposons également que la santé des travailleurs a un effet sur leur productivité du travail. Nos résultats suggèrent, en particulier, que si la santé des personnes âgées (respectivement jeunes) est affectée, l’impact sur la santé de l’efficacité énergétique résidentielle devrait avoir un effet « backfire » (resp. effet rebond) sur la consommation d’énergie, en favorisant l’épargne de précaution (resp. la hausse de la productivité du travail).
En termes de politiques publiques, en montrant que le lien entre l’efficacité énergétique et la consommation d’énergie est loin d’être simplement associé à des conditions techniques sur les préférences et/ou la technologie de production, notre recherche souligne à quel point est cruciale et complexe l’action politique concernant la prise en compte des interactions entre les politiques de conservation d’énergie, le système d’assurance maladie et la croissance.

WP 2022.03 Carbon Footprints, Traded Emissions and Carbon-Price Cooperation Equity

Dominique Bureau

Résumé
L’observation des écarts existants entre les émissions de CO2 appréciées au niveau des inventaires territoriaux et celles résultant des demandes finales intérieures des pays (empreintes) met en exergue la nécessité de réduire les émissions importées des pays développés. Une tarification élargie du carbone aux frontières y contribuerait, mais elle nécessite d’écarter le risque d’utilisation protectionniste d’un tel instrument.
Cependant l’analyse ne peut se limiter à cette question car cette taxation des importations n’est pas un substitut à une coopération climatique renforcée. A cet égard, un mécanisme fondé sur la fixation d’un prix commun du carbone, par le biais d’une harmonisation de sa tarification nationale ou par un marché de quotas, présenterait, en plus de ses avantages habituellement mis en avant en termes d’efficacité et pour construire la coopération, le triple intérêt : d’écarter d’emblée les objections liées aux distorsions commerciales induites par les politiques climatiques ; d’assurer la régulation des émissions importées et celle des émissions internes avec le même niveau d’ambition ; et d’agir à la fois sur l’usage des produits importés ainsi que sur leurs modes de production. Dans ce cadre, le recours à la taxation des importations devient inutile, sauf vis-à-vis des non-participants.
Cependant, un Fonds vert est alors nécessaire pour répartir l’effort équitablement. De plus, ses règles doivent être adaptées quand on intègre les émissions liées au commerce, ce qui n’a pas été pointé jusqu’à présent dans les débats sur l’article 6 de l’Accord de Paris. Les conditions correspondantes sont précisées ici. En particulier, il est souligné que cette approche permet de n’avoir à traiter que des effets distributifs nets de la tarification du carbone impliquant les échanges.

WP 2022.02 Drought exposure and accuracy: Motivated reasoning in climate change beliefs

Publié dans Environmental and Resource Economics (2023), 85: 649–672

Guglielmo Zappalà

Résumé
Le consensus scientifique sur le changement climatique et ses conséquences ne se traduit pas par des croyances individuelles identiques sur ces questions. Comprendre le processus de formation des croyances des individus et ce qui motive leur interprétation des événements climatiques est donc primordial, en particulier dans les pays en développement et parmi les communautés agricoles, qui sont les plus susceptibles d’être affectés négativement par le changement climatique. Cet article utilise des données d’enquête provenant de ménages ruraux du Bangladesh ainsi que des données météorologiques  sur des sécheresses excessives par rapport aux moyennes historiques afin d’étudier comment l’exposition moyenne à long terme à la sécheresse et les écarts à court terme façonnent les croyances concernant les sécheresses. Pour étudier la façon dont les agents interprètent les sécheresses passées, j’utilise une approche de variable instrumentale. J’étudie si les croyances individuelles conduisent à des distorsions de l’information de manière asymétrique. Les résultats montrent que l’interprétation des sécheresses par les individus est biaisée dans la direction de leurs croyances, fournissant des preuves suggestives du biais de confirmation comme mécanisme de raisonnement motivé. Les résultats soulignent le besoin de modèles tenant compte des facteurs comportementaux pour étudier les croyances au sujet du changement climatique et leurs implications pour une communication efficace et pour la formulation des politiques d’adaptation.

WP 2022.01 Local economic development through clean electricity generation – an analysis for Brazil and a staggered difference-in-difference approach

Swaroop Rao – David Grover – Dorothée Charlier

Résumé
L’adaptation des systèmes énergétiques mondiaux est considérée comme un élément clé face au défi du changement climatique. Pour les pays en développement et leurs banques de développement, ce défi s’ajoute au besoin du développement économique, particulièrement pour réduire les taux de pauvreté dans ces pays. Dans cet article, nous analysons les impacts économiques des projets de la banque nationale de développement brésilienne. Nous utilisons la méthode du « two-way fixed effects » (TWFE) pour analyser un panel de 15 ans au niveau communal avec un traitement qui varie avec le temps (un traitement « échelonné »), qui prend en compte certains développements récents dans la littérature d’analyse des données de panel. Notre étude montre que la production d’électricité propre a un effet économique plus faible par rapport à la production d’électricité à partir des sources fossiles. Cet impact différencié est particulièrement remarquable quant aux effets sur la création d’emploi et au niveau salarial. Cette étude est la première qui utilise des données micro pour analyser les impacts économiques différenciés de la production d’électricité propre et de la production d’électricité à partir des sources fossiles. Nous postulons que cet impact différencié est dû aux différences des intensités de main-d’œuvre entre les emplois créés par la production d’électricité propre et ceux créés par la production d’électricité à partir des sources fossiles. Nous recommandons que les coûts des externalités de ces projets soient internalisés afin de mieux informer les banques de développement et les décideurs politiques. Enfin, les impacts économiques plus faibles de certains investissements des banques de développement pourraient également avoir des conséquences négatives sur les efforts de réduction de la pauvreté dans le pays.

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